Meijin-Jingu, visite n°1.
Première visite dans un temple Shinto.
Meijin-Jigun. Equinoxe d’automne, un mardi férié. Il fait beau et presque trop chaud dehors, du coup grasse mat’, petit déjeuner japonais tardif (bol de riz, bol de soupe miso, petit poisson grille et un onsen tamago, tu serais fière de moi Jail). Ensuite, atteinte de flemmite aiguë, je peine a sortir de chez moi pour aller acheter du café (même ici j’en consomme toujours des litres !). Et je bosse un peu mon japonais.
Puis enfin, café aidant je chausse mes plus belles basket (un peu de repos des talons quotidiens pour mes pauvres petons) et je pars en vadrouille.
40 minutes de train plus tard (je ne prend que très rarement le métro en ville en fait) j’arrive a destination. Impossible de la louper cette entrée.
Comme vous pouvez le voir, énormément de solennité, la plupart des japonais saluent dès la première porte. Le chemin serpente au travers d’une foret dense et ombragée. Seul signe indiquant qu’on est en plein Coeur de Tokyo, le bruit des trains, qui pourtant se fait de plus en plus éloigné, avalé qu’il est par la profondeur de cette caverne végétale.
Puis signe d’ouverture au monde du Japon et de l’empereur, face a une grande collection de saké, se trouve une grande collection de vins, offerts par divers vignobles on ne peut plus français.
Puis, deuxième porte, et je vois tous les japonais se diriger sous un petit abris ou il y a ça.
On se purifie avant d’entrer dans un temple. J’observe et j’imite. Certains présents me sourient me voyant me plier a la tradition (visiblement la plupart des touristes ici se contentent de prendre des photos). Laver main gauche, main droite, et la bouche, comme manière de se purifier autant de ses actions que de ses paroles. Mésestimer ces dernières serait une erreur, on ne parle pas de langue de vipère pour rien.
Puis j’entre, après m’être a nouveau penchée a l’entrée du temple. Il y a bien moins de monde que ce que j’imaginais, et en fait pas tant de touristes que ça. J’aperçois une file de gens en costume traditionnel, ils traversent le temple marchants lentement, solennels. Ce doit être un mariage. Le calme est omniprésent. Le décors épuré. Les lignes sont simples, et chaque chose parait a sa place, point trop d’ornements, rien de superflu. Harmonie. J’aime la paix qui règne ici, je me dirige vers l’autel, jette une pièce, me baisse deux fois, tape deux fois dans mes mains, et les mains serrées l’une contre l’autre, je remercie le ciel de m’avoir conduite ici, avant de saluer a nouveau deux fois.
J’ai beau ne pas être Shintoïste, je fais partie de ceux qui pensent que toutes les religions, et particulièrement celles (si on peut parler ici de “religion”) qui ont pour pierre angulaire le respect de la nature et l’harmonie, méritent toutes autant le respect.
Puis je m’assoie sur un banc et écris ces quelques mots :
“Tokyo m’offre en ce premier jour d’automne le plus beau des cadeaux. L’introduction dans ce qu’il y a de plus sacre et traditionnel en son coeur. Il n’y aurait pas de mots pour décrire ce que peut apporter ce lieu. Ce long chemin au trace clair et défini au milieu d’une nature presque sauvage a un accent de pèlerinage. On monte et on descend, presque imperceptiblement, produisant plus ou moins d’efforts, sur un tracé qui ne doit certainement que très peu au hasard. C’est l’esprit vide que j’arrive au temple. L’eau fraiche portée a ma bouche me rattache a la réalité. Le silence est partout. J’ai regardé les horaires d’ouverture et je pense que je reviendrai a l’aube, des le premier métro, me (re)poser ici et rêver encore un peu, éveillée. Le ciel est habillé de lumière comme seule en produit cette ville. Un dégradé pastel. Il faut que je trouve un endroit vraiment spécial pour observer les couchers de soleil ici, un endroit secret et aussi paisible que celui-ci. La nuit arrive bien-tôt, mais ce ne sont pas les ombres qui envahissent la ville. Ce sont les multitudes de couleurs au contraire qui subitement laissent place a l’obscur, et révèlent la Tokyo qui ne dors jamais.“
Puis je continue mon chemin. J’ai l’impression de m’enfoncer de plus en plus profondément dans la foret, suivant toujours le trace clair et caillouteux au milieu de ces grands arbres.
Je n’entend bientôt plus que mes pas dans les gravillons, les feuilles qui murmurent et des dizaines de corbeaux qui semblent échanger dans une conversation bien animée. Leur cris transpercent la foret dont je ne vois pas le bout de chaque cote du chemin. J’essaie de ne pas penser a Birds de Hitchcock mais c’est peine perdue et je presse un peu plus le pas pour arriver je ne sais ou. Puis je tourne a gauche, le chemin et la végétation, plus minces, semblent m’indiquer la sortie. Juste au moment ou je pars, la nuit s’installe, je suis bien contente de ne plus être toute seule au milieu de cette foret de moins en moins verte et de plus en plus noire.
Je continue néanmoins ma ballade, dans la ville cette fois. Je repère un ou deux minuscules café/bar ou je voudrais bien revenir accompagnée, j’enregistre mentalement les lieux. Je n’emporte de cette fin de ballade que ce souvenir numérique. Un temple Shinto, d’un autre acabits, au coin entre une voie rapide et des petites habitations a flanc de voie ferrée. Encore une preuve que le Shintoïsme est ici partout, qu’il exprime tout son gigantisme ou reste tapis dans un coin.
Je n’aurais pas pu rêver plus parfaite première journée d’automne, ma saison préférée. Et je ne pouvais pas ne pas la partager avec vous.